Catégorie : DES MOTS

PANDÉMIE

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Le directeur général de la mort apparait tous les jours sur le télécran. Avec un rythme de métronome il égraine les décès du jour. Il y’a les défunts sur des courbes rouges, vertes ou bleues. Il dit que c’est catastrophique mais moins qu’ailleurs. Il dit que nous devons être sages et bien rester à la maison sinon nous tuerons d’une simple respiration nos aimés. Il dit que nous devons applaudir à 20 heures le spectacle du réel.

Aucune émotion, voile noir de technocrate sur l’horreur du passé et d’un monde sans avenir, la peur dans les foyers, le brouillard dans nos idées, attraction et répulsion morbide d’une propagande dans le contrôle du réel sous forme d’infantilisation, le jour se lèvera t’il demain matin ?

(texte post confinement)

Image : La mort  – techniques mixes sur pochette de dessin 24X 32 – 2020

COLÈRE SOURDE

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Le bruit oublié de la circulation, la police partout, les sans visages de sortie, plus aucune expression sur personne, des marcheurs perdus et tristes, un jour de libération qui ressemble à une journée de condamnation de plus.

Le ministre du fric s’affiche tout sourire et nous demande de l’entrain.

Nous n’entendons plus les oiseaux et il pleut.

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(Texte écrit le premier jour du déconfinement)  .

JOURNAL DE CONFINEMENT N°543

LIBÉRALISATION ANXIOGÈNE C19

Aujourd’hui est un petit jour. Le jour de permission de sortie, celui des commissions.

J’ai moi même signé mon autorisation.

Je n’ose toucher le charriot. Les microbes sont là , c’est sur : je vais être contaminé. Combien de mains s’y sont posées, combien de malades crachant leur fin de vie se sont soulagés ici ?

Le vigile sécuritaire tremble de peur. Il est devenu mon égal, mon frère. Il n’y a plus de pouvoir, plus de hiérarchie, nous sommes tous égaux. L’ordre a disparu au profit de la solidarité pour la survie derrière le mal inconnu. Nous rentrons au goutte à goutte. Plic ploc plic ploc. Sinistre ballet des automates zombies, le temple de la consommation ouvre ses portes à ceux qui ne sont plus ses fidèles mais ses prisonniers.

Du dentifrice, des pâtes, du savon. Les couleurs criardes sont devenus fades et les allées bondées : des déserts sans âme. Des saucisses, de la semoule, de la javel. Nous nous sommes illusionnés de notre propre magie. Coca Cola « ouvrez du bonheur ». Et ces haricots du bout du monde, qu’il y’a t ‘il dedans ? Avec quel pesticide ont ils poussé? À quel point est ce que ça a tué la terre et à quel point cela me tuera t’il ? Ont ils fait le tour de la Terre avant d’être dans cette conserve ? Vont ils me renforcer de leurs vitamines ou me condamner en tuant mes défenses immunitaires ? Du fromage, des fruits, des biscuits pour les enfants, de la sauce tomate, de la lessive. Comment ça il n’y a plus de désinfectant ?

Sortir le plus vite possible. Ne rien oublier pour surtout ne jamais revenir. Ne prendre que le stricte nécessaire. Tout pue la mort ici. Agir en vitesse avec des gestes surs et efficaces. Je suis au cœur du réacteur libéral et je me dois à la plus grande prudence…

La caissière au visage masqué et aux gants plastiques est devenue héroïne de courage. Elle, si longtemps ignorée, distille des sourires aux pénitents que nous sommes. La bouteille de lait fuit. Je perds ma concentration une seconde et je me touche le visage. Nos regards se croisent. J’ai fait une erreur, nous le savons tous les deux. Je suis peut être contaminé.

Voilà, je suis dans mon véhicule aux particules fines. Je me désinfecte les mains avec le peu de gel hydro-alcoolique qu’il me reste. Je retourne dans mon cube. Les rues sont désertes. J’enlève mes chaussures. Je pose mes courses sur la table. Je me relave les mains. J’attends pour les ranger. Le virus est peut être encore là. Le virus est invisible. Le virus peut être en chacun de nous. Le virus est issu de reine mère la Terre et nous ramène à notre condition d’hôtes provisoires.

Encore 10 jours à attendre pour savoir si j’ai contaminé ma famille confinée en voulant qu’ils se nourrissent …

La liberté est dernière la fenêtre. Le soleil me nargue de sa magnificence. La nature reprend ses droits. Je rêve de courir nu en jouant de la cornemuse au milieu d’un champ de pâquerettes. Demain est à construire …

 

FIN DE PROGRAMME (68) – CE QUE L’ON NE PEUT PAS DIRE

Les temps sont décédés.

Les traumatismes boivent du rouge sur de la musique binaire. Les langues se délient en souvenir des horreurs communes. Le loup doit cesser d’aboyer pour ne plus être agneau. L’empreinte de l’odeur doit disparaitre de l’esprit. Les tentacules de la pieuvre sont miel et douceurs pour l’ignorant. Le sage déraisonne devant le comptage méthodique de la destruction reconstruction personnelle. La colère dévorante sert l’inaction et la beuverie. L’omniprésence de l’œil borgne est faussée par la réalité. La détresse du playmobile est salvatrice. L’évidence sera sacrifiée sur l’autel des sentiments pratico-pratiques. Les fracassés de la vie ne reconnaissent pas les compteurs. Celui qui doit se taire hurlera des mots faussement insensés. Le vampire se limera les dents jusqu’au premier rayon de soleil. La chatte aimante ne désire que le trône et se fiche de vos genoux. La folie n’est que raison muselée. Les cycles sans fins ne mènent qu’à la fin. Le pauvre a oublié sa richesse. La tristesse apportent des espoirs moribonds. Les je de maux obscurs se cachent à la la lumière du n’importe qui. L’échappatoire ne peut qu’exploser pour exister. Le ridicule tue à petits feux éteints. L’exhibition sacrificielle donne à rire gras aux fêlés du cube méthodique. Le hasard est inconscience volontaire. Monsieur cauchemar avale la beauté inexistante. Le silence nourrira la pourriture secrète. La paix c’est la mort.

Si la bouteille est finie, d’écrire tu arrêteras.

Paf !

TRANSMISSION 5642 [5 MARS 2229]

Ici Navire 99 bis. Nous tentons un énième retour sur la planète bleue. Les turbulences des hautes sphères ont sérieusement ébranlé la carlingue. Une révision du bon fonctionnement de la machinerie semble nécessaire. Une légère fatigue due à un encrassage massif dans la tuyauterie perturbe l’écoulement heuro-psychique depuis quelques millions d’années.